L’aide médicale urgente : quelques critiques


Manque d’information et mauvaise communication

La procédure pour avoir droit à l’Aide Médicale Urgente (AMU) est administrativement compliquée. Par ailleurs, les communications que l’on peut trouver sur cette procédure sont peu faciles à comprendre.
Ainsi, comment une personne qui ne parle sans doute pas ou pas bien le français peut-elle avoir la connaissance du système et des démarches à mettre en place ?

De plus, la procédure change selon les CPAS : documents différents, enquête sociale ne se passant pas de la même façon...

Ensuite, les professionnels des soins sont souvent peu informés eux aussi du système et donc risquent, lorsqu’ils rencontrent une personne pouvant prétendre à l’AMU mais n’en bénéficiant pas encore, de mal la renseigner, de ne pas la diriger vers les bonnes personnes ressources ou les bons organismes.

Par ailleurs, la notion d’ « aide médicale urgente » porte à confusion. Alors qu’elle recouvre autant les soins préventifs que curatifs, beaucoup de professionnels des soins de santé confondent et pensent que seuls les soins curatifs sont couverts. Cela est renforcé par le fait que, sur le certificat qu’il remet au bénéficiaire, le médecin doit spécifiquement indiquer le caractère urgent des soins qu’il prescrit pour ceux-ci soient pris en charge par le vocabulaire. Et les termes utilisés et la démarche à suivre sont donc sources de confusion !

Enfin, l’accueil dans les CPAS est souvent inadapté :

  • prise de rendez-vous par téléphone alors que pour une personne ne maitrisant pas le français, s’exprimer au téléphone est plus difficile,
  • longue attente avant d’être reçu,
  • mauvaise compréhension entre le bénéficiaire et l’assistant-e social-e due à des barrières linguistiques...

Procédure compliquée et ne permettant pas d’accéder directement aux soins

Pour bénéficier de l’AMU, la personne en séjour irrégulier doit présenter au CPAS un certificat établi par un prestataire de soins et qui constate la nécessité des soins médicaux. Or, beaucoup de CPAS ne prennent pas en charge cette première consultation. Ainsi, les personnes n’ayant pas les moyens de payer cette première consultation voient leur accès à l’AMU réduit.
Par ailleurs, les médecins ayant conclu une convention avec le CPAS, et donc acceptant cette 1e consultation gratuite, sont trop peu nombreux.

En outre, lorsque les soins sont urgents, les personnes qui souhaiteraient bénéficier de l’AMU sont freinées vu les délais pour obtenir un rendez-vous au CPAS et vu le délai d’un mois dans lequel le CPAS peut donner sa réponse. Dans ces cas-là , souvent, ils se retournent vers les urgences.

Or, l’accès aux urgences des hôpitaux n’est pas aisé non plus. La personne se voit souvent renvoyée chez elle parce que le problème médical qu’elle présente n’est pas suffisamment grave ou urgent. Or, si les personnes en séjour illégal font appel de manière inappropriée aux urgences, c’est sans doute pour plusieurs raisons. D’un côté, certains méconnaissent peut-être les services de 1e ligne qui n’existent pas chez eux. D’un autre côté, pour la plupart, très certainement, les soins dont ils ont besoin ne sont sans doute pas assez urgents aux yeux des services des urgences mais sans doute trop urgents pour pouvoir attendre le délai nécessaire à bénéficier de l’AMU.

De bonnes pratiques existent cependant dans certains CPAS pour contourner cette difficulté. En effet, ces CPAS ont décidé de travailler de manière préventive en délivrant à la personne en situation irrégulière des cartes médicales valables trois mois et renouvelables facilement. De cette façon, les personnes ne doivent pas attendre un mois avant d’avoir accès aux soins et peuvent facilement accéder à la médecine préventive.

Situations particulières : les sans-abris, les migrant-e-s européen-ne-s

Le CPAS accepte les demandes d’AMU pour les personnes ayant leur résidence principale sur le territoire de la commune. Dans ce cas, qu’en est-il des sans-abris ?
Ceux-ci sont dans l’impossibilité de fournir une preuve de résidence demandée par le CPAS lors de l’enquête sociale. Ainsi, les CPAS souvent refusent d’accorder l’AMU parce qu’ils s’estiment incompétents et renvoient la personne vers un autre CPAS.

De leur côté, les migrant-e-s européen-ne-s sont particulièrement exposés au non-accès aux soins de santé. En effet, pendant les trois premiers mois de leur séjour sur le territoire, ils sont considérés comme touristes. Pendant ce temps, s’ils n’ont pas de couverture en soins de santé dans leur pays [1], ils y sont renvoyés pour recevoir des soins. Cela sans prise en compte de la situation dans leur pays d’origine. Pensons par exemple aux pays aux, suite aux mesures d’austérité, les soins de santé sont rendus de plus en plus inaccessibles financièrement.
Ensuite, ce délai de trois mois passés, si leur situation n’est pas régularisée (c’est-à -dire qu’ils n’accèdent pas au statut de résident via un travail ou un mariage), ils sont considérés comme en situation illégale eux aussi. Ils peuvent dans ce cas bénéficier de l’AMU.

Portfolio



[1Dans ce cas, ils ont accès aux soins via la carte européenne d’assurance maladie, qui est délivrée par la mutuelle du pays d’origine.

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